Brouillard… probablement le meilleur nom de projet black métallique de tous les temps (j’en suis jaloux). Un nom qui se suffit ; qui réussit à lui seul à animer en nous le grand vertige incantatoire caractéristique à ce genre musical qui nous est si cher. Le Black Metal atmosphérique, quand il est aussi bien apprêté que celui dont recèle ce premier album de Brouillard, devient matière sonore sublimée ; en suspension (comme le phénomène météorologique en question). Et malgré l’âpreté savoureuse des moyens utilisés et la violence primordiale qui découle des intentions derrière l’oeuvre, elle a énormément à voir avec la musique ambient. Parce qu’ici, tout est lié dans une espèce de vapeur mystique, opaque et hallucinogène, dans laquelle il fait bon se perdre, s’oublier, rêvasser ou cauchemarder (c’est selon).

Brouillard, c’est le one-woman band d’une Française qui vit loin de tout, au pied des Pyrénées. La géolocalisation n’est pas juste un détail anodin qui sert à remplir une case journalistique ici… Non, cette musique est foutrement empreinte de son lieu d’origine. Chez Brouillard, on à affaire à un Black Metal montagnard/frigorifié/rugissant, comme celui du Suisse Wintherr (membre de Darkspace et surtout : géniteur et seul maître à bord de Paysage d’Hiver, grosse influence avouée pour Brouillard). Un Black Metal naturaliste, dédié entièrement aux éléments dans toute leur vivacité effroyable, loin de toute accroche populiste ou ludique… Cette musique n’est pas divertissement. Elle est communion, cri primal, tempête terrible, sortilège antique, crachin démentiel… Et elle est magnifiquement laide et horriblement belle à la fois.

Qui plus est, chez Brouillard, on ne fait que du Brouillard. Le nom d’artiste est Brouillard. C’est aussi le nom de cet album et de tous les albums de Brouillard à venir. Ce sera aussi le nom de toutes les pistes enregistrées par le projet. Éternellement. Le concept qui ne dévie jamais de sa route obtuse ; fidèle à ses principes, précis dans le flou inextinguible, quasi obsessif-compulsif… Les titres de Brouillard sont presque toujours longs, entre 10 et 20 minutes en moyenne. Ils déferlent dans nos tympans tels une tempête cosmique qui est parfois annoncée par une introduction ambient surgelée/crépusculaire.

Ce premier opus contient 3 pistes absolument spectaculaires, toutes gorgées de frimas, de cris torturés et de guitares extatiques qui semblent s’extirper d’un marécage fumant pour se perdre dans un ciel sclérosé. Tout le génie de Brouillard y est déjà présent. Ce n’est pas un coup d’essai. C’est le premier jet totalement maitrisé d’une des discographies underground les plus fascinantes qui soient.

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